Divers

1020.

Le vide de ce gars-là, ce qu’il écrit, me fascine. Je m’y enchaîne le foie tendu.

 

Au-delà de la langue ? – Le chant. L’horizon. Les Amaps.

 

Je préfère une injustice à trois heures de lecture perdues.

 

Notre époque a inventé le roman escalator. Qui dans le flot est personnage, qui est lecteur, on ne sait pas.


Mais qu’un écrou lâche – et l’on verra l’escalator devenir laminoir.

1019.

« …père prêtait esgourde à mon prêche. » Feuilletant à nouveau le livre de Jean-François Beauchemin, Le jour des corneilles, que je n’ai
jamais pris le temps de lire, ni eu l’envie, moins encore aujourd’hui à l’occasion de sa réédition en Libretto aux éditions Phébus, et malgré le bandeau annonçant livre culte, je ne
peux me défaire d’une sorte de rire nasal à quasiment chaque page de cette langue abrupte dans l’intention mais ridicule dans les effets, au moins sur moi. Ce livre plutôt honnête, autre manière
de le disqualifier, me paraît être le prolongement du film de Jean-Marie Poiré, Les Visiteurs, dont ce serait la version 3 ou 4, une nouvelle d’ailleurs est en cours, lui aussi film
culte, dit la publicité. C’est déjà pas si mal.

 

 

Je préfère de loin Repas de Morts, de Dimitri Bortnikov, chez Allia (même si j’aurais coupé un tiers du texte).

 

(Au passage. Mettez donc deux sonnets côté à côté sur une tablette numérique.)

1018.

« …le champ qui s’étendait à l’infini vers l’horizon… » Je viens de lire ça quelque part (je sais parfaitement où, mais je dépouille la brute). Le
champ donc s’étendait à l’infini vers l’horizon. Pourquoi ne pas le dire en effet ? On ne rigole pas avec le réel. Le romancier s’en porte garant. Si le champ s’étendait à l’infini vers
l’horizon, que dire d’autre ? Un champ s’étend, un romancier l’écrit, un lecteur le lit. Pas de mal à ça. Un éditeur auparavant l’édite, un imprimeur l’imprime, un libraire a dû le vendre, ce
champ qui s’étendait à l’infini vers l’horizon. Rien que du bio. La nature est au roman comme une seconde peau, il s’en vêt quand il sort au champ. J’ai vu des champs, bien des champs dans ma
vie, des qui s’étendaient, des qui s’étendaient moins, des qui franchement n’allaient pas jusqu’au bout de l’infini, mais qui prenaient sur eux de s’étirer quand même un peu, histoire de suivre
la pente plus ou moins plane de leur élan, des champs de tous les temps, dont la nature était de s’étendre malgré tout vers l’infini de l’horizon, si bien qu’ils ne sortaient jamais vraiment des
ornières de nos préoccupations.

 

– Ah ! le réel ! le réel ! C’est le contraire qui s’est produit. Le roman est devenu notre tablette numérique : on l’emporte partout, on a vue
sur tout, on l’ouvre et on le ferme d’un clap.