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– Point de livre plus innocent qu’un mauvais livre, se dit Denis Marsac en consultant la pile de la rentrée de janvier 2011 diligemment offerte par quelques
éditeurs auxquels son blog inspirait une confiance déroutante. 2010 aura été pour moi une excellente année, ajouta-t-il, bout d’olive piqué sur un cure-dent, conscience tranquille et cœur
léger.
– Comment vous dire, aborder la question, vous faire savoir que j’ai, enfin que je, qu’il m’arrive de, disons que, eh bien oui, c’est ainsi, pourquoi le taire, goûts et coulures imprescriptibles, n’en faisons pas mystère, disons-le, avouons – l’avouerai-je ? – j’aime, oui, j’aime, que dis-je, j’idolâtre Georges Duhamel et sa Chronique des Pasquier. Le notaire du Havre et Le Désert de Bièvres emportent mon adhésion la plus inconditionnelle.
Dans le miroir de sa salle de bain, David Marsac se sentit soulagé d’avoir cracher le morceau afin de dissiper tout malentendu posthume entre lui et la littérature contemporaine.
(Dans le lavabo : sa dent.)
J’aime les livres où la littérature se donne pour artifice, où le récit tourne au procédé, où la phrase constitue toute l’intrigue, où les personnages ont l’épaisseur du papier imprimé, où le réel s’ajuste à la lecture, où le flux coule et rien ne reste, où l’émotion est lexicale, où le lecteur ne cherche ni père, ni mère, si souvenir d’enfance, où le libraire n’ose pas coller ses papiers tue-mouches, où l’auteur refuse de passer sur France-Inter (où l’auteur se dit quand même France-Inter fluidifie les ventes), où l’écriture tient lieu de style, où la vie est tenue à l’écart –:– car la vie est trop précieuse pour être confiée à la littérature.
Son art poétique achevé, David Marsac se recoucha et s’endormit heureux, après s’être brossé une à une la dent.