BLOG

153.

Quand je rencontre une histoire, je la fais danser. À coups de revolver sur le pavé.

 

Danse, danse, au son des chargeurs, ruisselant de fluidité, la mélodie en poudre te suit sur le trottoir, tes goûts te sont comptés.

 

Il est temps de payer. Le bip du code à barres sort le lecteur de sa rêverie, roman époustouflant dans sac plastique. (Amour, meurtre et docilité.)

 

Sous les tables des libraires, David Marsac voyait de loin exploser l’os du crâne et les cervelles dans l’atmosphère vivifié. Mieux qu’un 14-juillet !

 

Puis rangeait son détonateur.

 

(Sortir sans payer en contournant les flaques sur la chaussée.)

152.

La peur du manque alimente la pénurie. Et le blocage est ainsi assuré par ceux qui cherchent à l’éviter.

 

« La file d’attente de vos désirs est le
moteur de notre énergie ! »

 

– Ça a de la gueule, se dit David Marsac, ajustant le brassard noir de la révolte devant le miroir de sa salle de bain.

 

(+ œil tourné vers les commandes.)

151.

Vous êtes devant deux livres. Le gros volume de Parune Femme ; L’Ange Hypnovel de Françoise Clédat.

 

Gros volume vous tente, vous avez faim et vous lisez Télérama. Le titre du mince et frêle vous interpelle cependant. « Quel ange romanesque
pourrait tenir en quinze pages ? »

 

Vous approchez la main de Gros volume, terrain connu, après hésitation (vos scrupules socialistes). « Cinq euros, c’est quand même cher pour
quinze pages agrafées » (la vie est lente et vous êtes économe).

 

David Marsac, halo sur ciboulot, le saint homme, entre en scène, tunique et cordelette, sandales et bataclan, main providentielle : « Ô, lectrice égarée, pose
ta main là. »

 

(+ convertir la belle sur un coin de table ?)

 

– C’est simple comme la vie. Ouvre les yeux et croîs.

 

(…)

 

t’entourer de mes bras, irrespectueusement te bercer avant que la mort avérée libérant en même temps que mon cri l’intensité charnelle ne jette une ultime fois,
sans retenue, mon corps d’amante sur ton corps d’amant.

 

…ouvrons ouvrons notre corps

faisons de notre corps matrice douce lèvres pétales l’enfantin mourir des mourants enveloppons berçons de notre vulve à notre gorge dans cet enveloppement dans
ce berceau fendons ouvrons notre corps

 

Le seuil où l’amante a failli


confiante en ton réveil

n’aura pas vu venir ta mort

 

ne t’aura pas bercé n’aura pas ses bras n’aura pas son corps ses grandes lèvres comme des ailes

n’aura pas son corps l’ange de ta mort

avoir été

 

Ceci est un poème

 

(…)